Ce qui marque immédiatement dans cette bande dessinée, c’est la plongée permanente dans les planches, la vue de dessus tout au long de cet album. Dès les premiers pages, on quitte le statut de lecteur pour celui de spectateur. Et on est amené à observer, depuis notre promontoire, plusieurs personnages se débattre dans leur vie quotidienne, dans une zone urbaine qui est celle de Padoue en Italie, mais qui pourrait être n’importe quelle autre zone grise résidentielle et commerciale.

Padoue, vue d’en haut

Miguel Vila nous fait observer d’en haut une tranche de vie de personnages ordinaires : Irène, une caissière de supermarché ; Fabio, son frère, amoureux éperdu de Catia, mais qui a un problème avec l’alcool ; Guilia, un étudiant un peu perdu ; Nico, un baratineur invétéré ; Chiara, qui étouffe et malmène son petit copain… Tout ce petit monde interagit, s’observe, s’appelle, se suit via les réseaux sociaux, s’envie, se moque.

Pour raconter ces croisements, Miguel Vila multiple les formats de case : des grandes, des petites, des gaufriers, des vignettes ronds. Les planches sont tantôt épurées, tantôt chargées de détails. Ça fourmille, ça ralentit, ça s’accélère, on contemple les pages. Il ne se passe rien et pourtant c’est passionnant. On (re)connecte les relations entre les personnages au fil des pages. L’ombre de Chris Ware n’est pas loin.

Néanmoins, Miguel Vila n’a pas son pareil pour dessiner des visages bouffis de sommeil, des faciès aux yeux rougis d’avoir trop pleuré. Il met sur papier les corps bedonnants, les imperfections des peaux, les rides, les seins trop gros, sans les rendre outrageants, sans les discriminer, sans les esthétiser non plus, juste parce ce sont nos corps, ceux de tout le monde.

Padovaland est donc un récit atypique, un aperçu de vies qui pourraient être les nôtres, un mélange de déceptions, d’attentes, de frustrations, de réalités, de banalités que Miguel Vila nous propose de partager.


Références

Padovaland – Miguel Vila
publié par Presque Lune


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